Déconcentralisation
( version 2.1/ 9 Juin 2003)

Ecrit au fil des jours


[ "Original Message -----
From: jacques.caude
To: Lutte ; AG-education-region-Lille@yahoogroupes.fr
Sent: Saturday, May 31, 2003 4:15 PM
Subject: [rdb-fr] la décentralisation, ça se passe réellement comme ça!

C'EST MEME PAS L'AVENIR, C'EST LE PRESENT!!!"  ]


Il se pourrait même que ce soit un long passé

Si c'est le présent c'est bien que les mesures avaient au moins déjà été prévues dans le passé et il n'est pas inintéressant de s'intéresser aux think-tank français ( les livres de Nico Hirtt par exemple ou les divers sites d'Attac  apportent beaucoup de liens internationaux mais peu de liens locaux ) qui ont été chargés de mettre en place la décentralisation et qui servent de conseils aux différents ministères depuis quelques années .



Decentralisation 1 : Institut de la Décentralisation
Decentralisarion 2 : Complément : Institut de la Décentralisation / Altedia

Décentralisation 1

"L'institut de la Décentralisation"

Un des plus importants dont le nom ne fait pas mystère est " l'Institut de la Décentralisation " qui se présente lui-même ainsi :
 

"Créé en 1986, l'Institut de la Décentralisation est un centre indépendant d'études, de propositions et de rencontres au service des acteurs de la décentralisation.".
Vous pouvez consulter les sites liés, les membres du conseil d'administration …

Il étudie donc depuis cette date la mise en place de la décentralisation  et l'on y trouve le bilan qu'il faisait de cette décentralisation en 2001 et la manière dont il recommandait de continuer à avancer dans ce sens  ( et il explicite très nettement qu'il existe au moins de puis 1979 des lois qui empêchent de revenir sur " les conquêtes de la décentralisation" ) . J'ai omis toutes les allusions à la lutte contre la "bureaucratisation" car, justement, les progrès de la décentralisation se sont toujours accompagnés d'un renforcement des attitudes bureaucratiques  et d'un épaississement certain du mammouth à cet endroit ( il semblerait d'ailleurs que chaque fois que l'administration met en place une lutte contre le phénomène bureaucratique "pilotée" par des sociologues industriels spécialistes du phénomène, le seul résultat immédiat est que les partisans du nouveau processus expérimental obtiennent de nouvelles places de responsabilité et le résultat à court terme est qu'il s'ensuit très vite un accroissement du "phénomène bureaucratique", ce qui déclenche une nouvelle vague de lutte contre la bureaucrate qui elle même …… On aurait presque l'invention du mouvement perpétuel ).

 Les cahiers de l’Institut de la Décentralisation  N° 5 - Juin 2001
"Etat, organisation territoriale : de la « réforme » aux évolutions constitutionnelles"
par Hugues PORTELLI
Préface de Jean-Pierre Balligand, Pierre Méhaignerie, Robert Savy, Adrien Zeller
 

Y est étudié l'état réel de la décentralisation , qui est fort avancé on va le voir et les raisons qui poussent à l'existence d'une nouvelle loi .

Citons tout d'abord , l'exposé des motifs de la nouvelle loi ( mes commentaires entre [] )
 

"La décentralisation française [ la "déconcentration" est donc bien la décentralisation ] aura bientôt vingt ans et chacun peut constater que, si elle a donné un élan extraordinaire aux collectivités territoriales en libérant les énergies des décideurs publics, élus et fonctionnaires, ses limites apparaissent nettement aujourd’hui….
En 1982, les décentralisateurs avaient opté pour l’efficacité immédiate : ne pas procéder à l’étape a priori indispensable, celle d’une adaptation préalable d’une Constitution fondamentalement centralisatrice et étatiste dans ses principes et sa philosophie, qui aurait permis au législateur de bâtir le nouvel Etat décentralisé sur des bases solides. Les “lois Defferre” contournèrent donc l’obstacle constitutionnel [ et donc permettait tout à fait légalement de dire que ce n'était pas une vraie décentralisation puisqu'il s'agissait d'une décentralisation qui ne pouvait s'avouer en tant que telle puisqu'elle devait contourner les obstacles, ce qui permet aux partisans honteux de la décentralisation de dire qu'il ne s'agissait que de déconcentration] et réussirent à obtenir l’aval, pour l’essentiel, du Conseil constitutionnel. Les réformes qui suivirent obéirent au même principe, celui de mesures de nature législative  [ et non constitutionnelle ]…..

Cette législation a atteint aujourd’hui ses limites : il n’est pas possible de doter les collectivités territoriales d’un pouvoir réglementaire propre, d’une autonomie financière réelle, de statuts différenciés sans se heurter au veto du juge constitutionnel ou du juge administratif qui ne font que se conformer aux textes constitutionnels dont ils ont la garde. Les temps sont venus de franchir le pas auquel le législateur de 1982 dut renoncer : celui d’une adaptation de la Constitution "  ( p. 41 - 42 )"


Puis, quelques développements :
 

"La “déconcentralisation”

Un choix stratégique …. tout indique que nous vivons aujourd’hui la fin du cycle de la “décentralisaton-Defferre”. Il n’est pas un parti politique, une collectivité, un élu local qui n’en convienne.( p.4)…

Une réforme constitutionnelle pour fonder et garantir l’État décentralisé et la démocratie ? Les “lois Defferre” ont desserré le carcan centralisateur de l’État en décentralisant certaines fonctions. L’étape suivante ne doit-elle pas alors consister à donner un fondement constitutionnel à la décentralisation, et d’ouvrir la voie à un nouvel ordre décentralisé" ( p. 24 )

La fin du cycle des "Lois-Defferre" La décentralisation française a été conçue comme un processus de modernisation globale de l’action publique et d’approfondissement de la démocratie.

Il s’agit, tout d’abord de clarifier les compétences avant d’engager de nouveaux transferts. Soulignant que “la décentralisation repose simplement sur la loi”, le Rapport Mauroy note ainsi que “la répartition des compétences n’est pas figée” et que “le cadre législatif et réglementaire peut être modifié pour prendre en compte les besoins du pays et des administrés”. Rappelant le principe de libre administration des collectivités locales qui “interdit au législateur de revenir sur les acquis de la décentralisation”, (  p. 17 )…..Le Conseil constitutionnel a affirmé dès 1979 (décision du 23 mai) la valeur constitutionnelle du principe de libre administration ( p.27)"

Je renvoie à tout le rapport qui est de la même eau. Il est cependant à noter qu'au niveau des méthodes à employer pour décentraliser, il conseille "l'expérimentation" que nous avons connu avec les différents projets successifs qui, quoi que l'on en dise, ont bien réformé l'Education Nationale.  Voir le Chapitre  II. (" Approfondir la décentralisation par le biais de l'expérimentation" - p. 35 ssq) où il est quand même explicitement dit " le concept d’expérimentation s’inscrit très exactement dans l'approche …  : «la prochaine avancée décentralisatrice doit elle-même se concevoir de manière centralisée, ouverte à la diversité, adaptable»", ce qui fait de l'expérimentation est un élément  indissolublement lié à la décentralisation, élément sans lequel il est impossible de la comprendre.
  Or, ce discours n'est pas nouveau et, sans remonter aux années 80 qui voit sa généralisation en tant que méthode anti-bureaucratique de réforme , c'était exactement la méthode prônée par Claude Allègre,  avant qu'il ne soit ministre :
 
"Il ne faut pas chercher à tout changer d'en haut. Il faut pratiquer la stratégie de l'épidémie, procéder à certains changements ponctuels, mais sur des points clefs, et voir comment les choses se passent. Aussi, je crois qu'il faut se concentrer sur la réforme des études scientifiques. [...] Je crois qu'il faut tirer les fils là où on peut les tirer, sans tenter de prévoir ce qui peut se produire  ". ( La Recherche n°182,  décembre 1995 )


ou une fois qu'il l'a été :
 

" Là non plus je n'ai pas l'intention de réformer par le haut, mais je me garde le droit de susciter le débat et d'inciter les évolutions ”. (La Recherche, N° 308 Avril 98 )


Une lecture superficielle  des événements pourrait pousser à se demander si les méthodes Allegre et Raffarin n'auraient pas en commun de "ne pas prévoir ce qui peut se produire" mais on est sûr qu'elles ont en commun "d'inciter les évolutions", de "contourner les obstacles" et surtout de "s'appuyer sur les initiatives". Il est donc normal, dans cette perspective,  qu'il soit recommandé que  l'expérimentation ait  maintenant un  fondement constitutionnel  puisqu'elle est qualifiée de " méthode pédagogique" ( p. 35 ) et qu'elle sert à contrer les "résistances au changement " ( p.35 ) où, en plus pédant : "Le succès croissant que rencontre le concept d’expérimentation vient donc du fait «qu’il semble pouvoir jeter des ponts entre la norme et la praxis, entre l’unité et la diversité, entre l’instant et le moyen terme, entre l’audace et la raison »." ( p.35). Si M. Raffarin , qui était un représentant des régions de l'Institut de la Décentralisation, est un philosophe de la praxis tout en étant spécialiste du management, on peut se demander s'il n'y a pas au moins confusion entre philosophie de la praxis et utilitarisme.

C'est peut-être en réfléchissant à cette vision de la décentralisation qui montre la différence entre la décentralisation effective et l'image qu'en donne le droit, que l'on pourra comprendre pourquoi hier soir, dans France Europe Express, Serge July a dit, d'un air entendu,  à Luc Ferry qui avait l'air fort gêné et qui n'a su que répondre "Les négociations ne commencent que demain matin", qu'il n'y avait pas de différences notables entre le report et le retrait de la nouvelle loi d'orientation.
 

Michel Delord - 2 Juin 2003

Suite des que j'ai un instant…


Décentralisation 2

Complément : Institut de la Décentralisation / Altedia

Les deux co-présidents de l'Institut de la Décentralisation sont Jean-Pierre Balligand, député de l'Aisne,  Maire de Vervins et Adrien Zeller, Président de la Région Alsace.

Mais on retrouve M. Balligand comme membre du club "Douze pour l'Entreprise", fondé par Boury-Associés  qui se présente ainsi lui-même :
 

" Douze pour l'Entreprise " a été créé en 1987 à l'initiative de Christian Pierret, alors député des Vosges et Ladislas Poniatowski, alors député de l'Eure. Son objectif était de favoriser le dialogue entre le monde économique et les responsables politiques. Il se situait au-delà des clivages politiques traditionnels en réunissant personnalités de droite et de gauche.
Depuis, " Douze pour l'Entreprise " a conservé les mêmes objectifs malgré les alternances politiques. Aujourd'hui, l'association réunit des parlementaires considérés comme d'excellents experts en matières fiscale, économique et financière, appartenant aux grands partis de la vie politique nationale :
 
Philippe Adnot, sénateur de l'Aube
Philippe Auberger, député de l'Yonne, président de la commission de surveillance de la CDC
Jean-Pierre Balligand, député de l'Aisne
Xavier Bertrand, député de l'Aisne
Michel Bouvard, député de la Savoie
Gilles Carrez, député du Val-de-Marne, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale
Yves Censi, député de l'Aveyron
Jean-Paul Charié, député du Loiret
Jérôme Chartier, député du Val-d'Oise
Jean-Michel Fourgous, député des Yvelines
Louis Giscard d'Estaing, député du Puy-de-Dôme
Pierre Hériaud, député de la Loire-Atlantique
François Hollande, député de la Corrèze
Jean-Marie Le Guen, député de Paris
Paul Loridant, sénateur de l'Essonne
Roland du Luart, sénateur de la Sarthe
Philippe Marini, sénateur de l'Oise,
rapporteur général du budget au Sénat
Hervé Mariton, député de la Drôme
Pierre Méhaignerie, député d'Ille-et-Vilaine,président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale
Didier Migaud, député de l'Isère
Hervé Novelli, député d'Indre-et-Loire
Ladislas Poniatowski, sénateur de l'Eure
Emile Zuccarelli, député de la Haute-Corse


L'association organise régulièrement, pendant les sessions parlementaires, des rencontres de travail restreintes (petits déjeuners ou déjeuners) avec une dizaine de chefs d'entreprise ou d'experts invités en fonction des thèmes.

Ce club n'est pas le seul organisé par Boury-Associés puisuqe l'on trouve aussi :
 
i) Le " Club des idées" avec notamment Patrick Devedjian, François Hollande, Premier secrétaire du Parti socialiste, Michel-Edouard Leclerc, co-président des Centres Leclerc , Jean-Pierre Mignard, avocat, directeur de la Revue Témoin, Jean-Louis Missika, président de JLM Conseil…

 ii) Le "Club de Sontay" avec, parmi les noms très connus ,Claire Chazal, directrice adjointe de l'information de TF1, Thierry Gandillot, rédacteur en chef de L'Express,Philippe Manière, directeur de la rédaction de L'Expansion, Pascal Riché, correspondant à Washington pour Libération…

 iii) Le "Club international"  présidé par Xavier de Villepin

 iiii) Le " Forum de la nouvelle législature "  : Comité d'orientation et de parrainage composé de Jacques Barrot, président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, Yves Cochet, ancien ministre, député de Paris, Jean-Paul Fitoussi, président de l'OFCE, Blandine Kriegel, philosophe, chargée de mission auprès du Président de la République, Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des Economistes, et Hervé Morin, président du groupe UDF de l'Assemblée nationale.

 iiiii) Le groupe "Parlement et communication" qui comprend entre autres Yves Cochet, député de Paris, Laurent Dominati, conseiller de Paris, André Santini, député des Hauts-de-Seine, Georges Sarre, ancien député, conseiller de Paris, Henri Weber, sénateur de la Seine-Maritime…
 

Mais le groupe de conseil Boury-Associés  a été acquis en septembre 2002 par Altedia (Cf.  Page " Historique" de Altedia.com ), organisme de consulting qui est brutalement devenu célèbre au début Juin 2003 depuis que Gilles Balbastre  a consacré un article à son PDG Raymond Soubie (Dans les coulisses de la "réforme" : une eminence grise du gouvernement français, Le Monde Diplomatique , Juin 2003, page 3).
 

Ceci est d'autant plus intéressant qu'une des spécialités d'Altedia est la  "Communication sociale de crise ", c'est-à-dire une des formes d'expérimentation sociale qui intervient lorsque "L'entreprise envisage de mettre en place un projet qui peut susciter une réaction négative de la part des salariés, voire des organisations syndicales. " . Ce qui amène un certain nombre de questions :

- Comme "l'expérimentation" mérite de devenir une valeur constitutionnelle, Altedia ne mériterait-elle pas qu'à la fin de l'exposé des motifs, on puisse lire : " Rédigé par Altedia" ?

- Avons nous, dans la crise actuelle, l'empreinte de cet organisme qui vend un "savoir faire" qui consiste à "Former les managers à la manière d'analyser les situations, d'avoir les comportements adéquats pour détendre un climat de crispation et ouvrir sur une issue positive." ?


D'actualité, non ?

Michel Delord - 3 Mai 2003
Homepage
Comité Directeur de la Société Mathématique de France

 
 PS : Mais Altedia a d'autres spécialités , et notamment en tant que spécialiste "de la gestion de la société du savoir" et de la communication dans icelle, elle a un  rôle dans la mise en place  par le Conseil Général des Landes de "l'expérimentation" :  "Un Collégien, un Ordinateur".
 
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( Source : Bas de page  )


Les Landes seront-elles l'équivalent de l'expérience menée dans le Hainaut et filmée par F. Gillery - je le mets donc en Cc - dans "Le cartable de Big Brother" ? Aurons-nous des scènes aussi comiques que lorsque l'on voit un bon nombre de managers de haut niveau s'ébahir devant des élèves de maternelles qui pilotent une tortue logo géante?