Complément
à l'article du
Monde de l'Education de Février 2007
« Calcul : vraie réforme ou effet
d'annonce ?
»
Dans l'article
cité, Michel Delord craint que
« cette réforme du calcul
mental n'en soit pas vraiment une ...» pour deux types de
raisons :
A)
Si l'on veut
tenter de résoudre les questions posées par la baisse de
niveau en
calcul, la question centrale n'est pas le calcul mental mais le calcul
écrit puisque c'est entre autres lui qui est la base du calcul
littéral et algébrique. La mise en avant du
calcul mental associé au «
calcul instrumenté» (en fait l'utilisation des
calculettes) est bien
souvent présenté, tout au contraire, comme une solution
permettant de
réduire l'importance de l'étude des algorithmes
écrits des opérations
et, en particulier de la plus compliquée, la division.
C'était par
exemple massivement le cas dans le projet de programme
présenté en
1999 dans lequel le maximum de connaissances exigibles en primaire pour
la division consistait à « rester
dans le champ de la table de multiplication liée au diviseur (si
on
divise par 6, le dividende ne dépassera pas 60) » [BO
Spécial 7
du 26 août 1999]. Vous avez bien lu, la division de 37 par 3
y est hors
programme du primaire.
Pour plus de détails
lire : Michel Delord, septembre 2006 : " Pourquoi
apprendre à faire les opérations à la main ?"
B) Le calcul mental reste un enseignement important mais ce qui est
enseigné actuellement en primaire non seulement n'est pas du
calcul
mental mais rend le calcul mental difficile et quasiment
infaisable dès qu'un des nombres en jeu dépasse la
centaine.
En effet trés souvent, ce qui est enseigné n'est pas du
calcul mental - qui a ses lois propres - mais le fait de faire «
de tête » du
calcul écrit.
Prenons un exemple
très simple, la multiplication de 57 par 4 :
- en
calcul écrit sur l'opération
posée, on dit :
4 fois 7 : 28 ; je pose 8 et
je
retiens 2.
4 fois 5 : 20 ; 20 et 2
(retenue écrite) : 22 que j'écris à gauche
du 8 déjà écrit.
Et je peux lire le résultat : 228 (même si j'ai
oublié le 8 qui est de
toutes les façons écrit).
- en calcul mental, on dit
4
fois 50 : 200.
4 fois 7 : 28.
200 et 28 : 228.
On peut voir les
différences :
-
en calcul écrit , on dit « 4 fois 5 »
et 5 est un simple
chiffre et n'a pas la signification de nombre, 50, qu'il a en calcul
mental. C'est ce qui permettait à
l'inspecteur
Cabois de définir ainsi en 1910 la différence entre
le calcul écrit
(posé) et le calcul mental :
«
Le
calcul mental est celui qui se fait sans le concours de
l'écriture. Il
est tout à fait différent du calcul écrit.
Le premier opère simplement
sur les nombres; le calcul écrit, au contraire, opère sur
les chiffres,
sans tenir compte des nombres, excepté pour le résultat
final »
- en calcul mental, on commence
par la gauche ce qui permet, entre autres,
a)
d'éviter les retenues qui seraient une
surcharge de la mémoire en calcul mental alors qu'elles ne
le
sont pas en calcul écrit
b) de donner, même s'il y a des erreurs de calculs, un ordre de
grandeur exact du résultat ( puisque les fautes de calcul sont
plus
fréquentes à la fin du calcul)
Cet exemple est très
simple mais essayer de faire de tête la
multiplication de 587 par 8
- en
commençant par la gauche (calcul
mental)
- en commençant par la droite, c'est-à-dire en
reproduisant mentalement
le calcul écrit
et vous comprendrez
rapidement pourquoi les enfants ne savent pas calculer de tête en
employant la deuxième méthode et se croient donc
mauvais en calcul mental.
Pour plus de
détails, lire :
Le
15/01/2007
Michel Delord
[Note 1] Le site de la
SMF présente ce débat à la page Enseignement
On y trouve les trois
parties du texte cité :
Textes de Michel Delord
pour la préparation de la réunion du 11 Octobre
2003 : "Précisons
nos divergences :Réponse sur un point à Roland Charnay et
à
la commission Joutard"
On peut également
consulter « La division nous divise », position sur ce
débat de Paul-Jean
Cahen,
à l'époque vice-président de la SMF (Contribution
publiée dans
le Numéro 100 de la Gazette des
mathématiciens
en Avril 2004).