AMUSE-GUEULE : L’ANGLE MORT
Dans la troisième partie de sa note sur SOS-Education, Luc Cédelle écrit :
Certes, le principal texte fondateur de l’antipédagogisme contemporain est sans doute le livre De l’école (Seuil, 1984) de l’ex-maoïste Jean-Claude Milner. Mais Philippe Nemo, le théoricien libéral auquel se réfère SOS-Education a pour sa part publié dès 1991 Pourquoi ont-ils tué Jules Ferry? (Grasset) et dès 1993 Le chaos pédagogique
(Albin Michel). Et l’hostilité aux « agitateurs » pédagogues est,
à droite, bien plus ancienne encore. C’est même un classique de la
droite dure.
Cette réaction de propriétaire,
de la part des antipédagogistes « de gauche », fait l’impasse sur une
série de questions n’ayant jamais donné lieu de leur part à aucune
analyse. Un véritable angle mort dans leur système idéologique.
Pourquoi leurs thèmes de prédilection sont-ils aussi appréciés à la
droite de la droite, au point que celle-ci en fait avec jubilation de
véritables décalques ?
Il est effectivement important de découvrir ce qu’il y a dans cet angle mort d’autant plus que c’est précisément un domaine qu’un certain nombre d’antipédagogistes ne veulent pas sortir de l’ombre.
Mais s’il est vrai que
l’antipédagogisme a ses angles morts notamment mais pas seulement « à
droite », le pédagogisme en a aussi, « à gauche » en quelque
sorte. L’on peut remarquer ainsi qu’une partie des actuels critiques de
l’OCDE furent en leur temps de chauds partisans de l’OCDE
et de son ancêtre l’OECE qui fut une marraine qui se pencha sur
le berceau des maths modernes et de l’importation du modèle managérial
à l’école. Lire à ce propos, pour s’en convaincre, Michel Delord, Marchandisation ? Du bon usage de l’OCDE juin 2003 et , par exemple des extraits du rapport de l’OCDE sur l’éducation de 1974 .
* *
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Sur le blog Education de Luc Cédelle
J’avoue ne pas comprendre ce débat.
Déjà, M. Brighelli, puisque
vous êtes là, je ne comprend pas pourquoi vous laissez intervenir sur
votre blog des commentateurs qui mélangent enseignement et politique
d’(extrême) droite. Je pense à celui qui a mis un texte de défense du
pique nique “cochon” rue Myrrha, texte dont je conçois assez mal le
lien avec la République ou avec l’enseignement.
[…]
Rédigé par : Javi | le 16 juin 2010 à 15:16
Lorsque quelqu’un parle,
l’important est d’abord le contenu ce qu’il dit et non pas d’où il le
dit. La thèse contraire est celle des "communicants" qui déterminent au
contraire le contenu en fonction du lieu, physique, politique ou
social, dans lequel doit être prononcé le discours et qui ont ainsi
donné, notamment en utilisant les sondages, un caractère scientifique
à la démagogie et à l’opportunisme. Elle est aussi parente avec celle
des sectaires - au sens historique - qui refusent l’affrontement
doctrinal avec « l’ennemi » au prétexte que le contact avec ses
théories risque de « polluer les purs
»qui doivent être placés dans une non-connaissance et une
non-fréquentation prophylactique des thèses adverses. Tactique
peut-être efficace à court terme [ Note 1 ] mais qui montre ses limites puisqu’il n’y a pas d’immunisation sans contacts.
Le problème
… - parmi les nombreux problèmes que pose la citation de Jami et
notamment l'affirmation que l'appel à l'apéro saucisson pinard de Riposte laïque "n'a pas de lien avec la République ou avec l’enseignement." - n’est donc pas que Jean-Paul Brighelli « laisse intervenir sur [son] blog des commentateurs qui mélangent enseignement et politique d’(extrême) droite » mais
a)
que les réponses qui leur sont faites sont extrêmement faibles sur le
fond, ce qui n’est pas indépendant à mon sens du point suivant
b) que le courant
‘antipédagogiste et républicain’ prend des positions pratiques et
défend des positions théoriques proches si ce n’est confondues avec
certaines postions d’extrême droite ce qui explique justement, comme
indiqué supra, leur difficulté à marquer une différence avec elles.
Il serait utile - et il
faudra le faire pour bien fonder ces affirmations - d’étudier
l’histoire de la « tendance républicaine » sur une longue
période, au moins plusieurs décennies, pour montrer que ce n’est pas un
hasard si cette tendance républicaine - et antipédagogiste - tend à ce
type de positions pour le moins nationalistes : ce serait le contraire
qui serait étonnant puisque le républicanisme a été sans discontinuité
depuis le début de la IIIème république aussi bien «
nationaliste continental » que « nationaliste colonialiste » : la
position de la majorité de ceux qui ont abattu Ferry-Tonkin
- l’alliance d’une partie de la droite et des radicaux - n’était pas
basée sur une critique du nationalisme mais au contraire sur la crainte
que le colonialisme ferryste ne soit pas suffisamment chauvin
anti-prussien et qu’il fasse oublier la ligne bleue des Vosges. On
pourrait aussi rappeler la compétition à laquelle se sont livrés le PCF
et le pétainisme pour savoir qui était le meilleur défenseur de Jeanne
d'Arc.
Et comme le fait remarquer K. Steven Vincent en conclusion de son article Nationalisme et patriotisme dans la pensée socialiste française du XIXème siècle :
Peu
de socialistes auraient rejeté ce qu'avait proclamé Alexandre Millerand
dans son fameux discours de Saint Mandé, en 1896, lorsqu'il avait
déclaré : "Nous ne devrions jamais
oublier que, bien que nous soyons internationalistes, nous sommes en
même temps des Français et des patriotes. Patriotes et
internationalistes, voilà deux titres que nos ancêtres de la Révolution
française ont su réconcilier noblement"
K. Stephen Vincent, Nationalism and patriotism in the Nineteenth Century French Socialist Thought,History of European Ideas, XV, 1-3, août 1992, pp.217-223.
Traduit par Thibault Isabel pour la ( fameuse) revue Krisis, , numéro 32, juin 2009, pp. 42-50.
Mais avant d'étudier sur le long terme la tendance républicaine , on
peut consulter les publications des groupes républicains actuels
« de gauche » et en particulier les publications de l’UFAL, de ResPublica ou de Riposte laïque
qui est une scission de ResPublica. Ils sont à peu prés tous des
descendants idéologiques de la position républicaine du PCF purement
stalinien née au début des années trente qui est elle-même la reprise
des thèses des républicains opportunistes , du radicalisme, du «
socialisme de la chaire » et en France du millerandisme…
8 novembre 2010
Michel Delord
Note
1 : Et même à très très court terme si l’on considère qu’une réforme de
l’enseignement ne se pense, ne se réalise et ne s’évalue au mieux que
sur une période de trente ans, c'est-à-dire lorsque que l’on
évalue la qualité de la scolarité complète des élèves des premiers
enseignants qui ont eu majoritairement des enseignants qui n’ont
eux-mêmes pas connu en tant qu’élèves des professeurs qui savaient
enseigner suivant les canons de l’avant-réforme.
* *
*
De Gaulle lui-même ne s’est pas montré trop choosy quand il s’est agi de défendre la France.
Renaud Camus, parti de l’in-nocence
Jean-Paul Brighelli fait partie dès août 2009 des « premiers signataires » - indiqués comme tels sur le site - de la pétition « Halte à la burqa et au voile, symboles de la soumission des femmes et de l’offensive islamiste »,
demandant au gouvernement de légiférer contre le port de la burqa .
Cette pétition se trouve sur le site de Riposte laïque qui ne joue pas
ici simplement un rôle d’hébergeur mais qui en partage aussi les
orientations d’autant plus que son fondateur Pierre Cassen fait partie
des trois personnes responsables de cette initiative pétitionnaire.
Il y a une abondante littérature sur la conception de la laïcité de Riposte laïque [Voir Note 2] - conception à laquelle je n’ai jamais vu Jean-Paul Brighelli faire une seule critique
- mais l'on peut remarquer qu'il n'est pas faux de dire qu'elle a
de fortes ressemblances avec celle de l'extrême droite dans la
conception et le rôle qu’elle donne à la lutte contre l'islamisme.
Ce sont d'ailleurs les membres de Riposte laïque
eux-mêmes qui expliquent et justifient cette proximité avec la droite
lepéniste comme le montre une des dernières déclarations de Pierre
Cassen le jeudi 17 juin dans un interview à Marianne:
Pierre Cassen
: C’est malheureux, mais dans tout le paysage politique il n’y a qu’une
personne qui reprenne le discours sur la laïcité à son compte. Vous
savez qui c’est ?
Marianne : Marine Le Pen ?
Pierre Cassen : Oui. Et si la gauche était moins conne, c’est ce discours là qu’elle aurait sur la laïcité.
On peut donc constater
que la progression idéologique constante de l’ensemble de
l’échiquier politique français vers la droite a fait quelques progrès :
non
seulement on affirme comme par le passé que le FN pose les bonnes
questions mais on rajoute maintenant qu'il est le seul à apporter de
bonnes réponses.
Avez-vous vu que Jean-Paul
Brighelli ait tenté quelque part de se démarquer théoriquement des
positions d'un responsable dont il signe une pétition ?
Quoi qu’il en soit, les questions suivantes demeurent pertinentes : si l’on considère qu’une certaine forme de droite extrême – dont en ce cas Riposte laïque - a été à l’origine de la demande d’une « loi sur la burqa »
qui vient d’être votée en en gommant les aspects les plus ethniquement
grossiers - il ne s’agit plus d’une loi sur la burqa -, doit-on
considérer que ceux qui, par exemple, ont signé la pétition contre la
burqa étaient conscients de ce qu’ils faisaient ou étaient-ils des
idiots utiles ?
Rappelons que je ne reproche pas à Jean-Paul Brighelli d’avoir ses positions. Mais par contre je trouve qu’il exagère + légèrement + lorsqu’il demande naïvement pourquoi on l’accuse d’être proche de l’extrême droite.
Et il comprendra, biens sûr,
que, sur ce point, je tienne à me démarquer de ses positions
comme il doit tenir à se démarquer des miennes.
11 novembre 2010
Michel Delord
Note 2 : Quelques analyses sur les positions de Riposte laïque :
Une autre anecdote est assez
significative si l’on considère les lieux théoriques de convergence
entre la droite extrême et le mouvement antipédagogiste :
Isabelle Voltaire est aussi une figure du républicanisme pédagogique, à la fois nouvelle trésorière du GRIP, membre important de Reconstruire l'école et secrétaire de l’UFAL 77, Union des Familles laïques du 77[Note3], organisme « pour le moins proche
» de l’association des familles laïques de Vaux-le-Penil, à laquelle
tout à fait par hasard Jean-Paul Brighelli destine sa dernière note «
Maternelles — et après ».
Or Isabelle Voltaire signe
avec Jean-François Chalot, président de l'UFAL 77, un texte public qui
reproche à la direction de l’UFAL d’être … sectaire par rapport à Riposte Laïque et ce pas pour n’importe quelle raison mais parce que sa direction nationale s’oppose à la vente du livre « Les dessous du voile » édité par Riposte Laïque, sujet qui est justement le point théorique de convergence du républicanisme ‘de gauche’ de Riposte laïque et de l’extrême droite identitaire .
Texte repris bien sûr immédiatement par Riposte Laïque :
RENCONTRES INTERNATIONALES LAIQUES
MEMBRES DE L’UFAL, NOUS CONDAMNONS LE SECTARISME DE NOTRE DIRECTION CONTRE RIPOSTE LAÏQUE
lundi 6 avril 2009, par Isabelle Voltaire, Jean-François Chalot
Les militants de l’Union des
laïques et des athées de Saint Denis ont été sommés par la direction de
l’UFAL de retirer les livres "Les dessous du voile" aux journées
internationales de la Laïcité qui se tiennent à Saint Denis les 4 et 5
avril, sinon ils se faisaient expulser !
Voilà un sectarisme imbécile, et bien éloigné des principes laïques, dont la fraternité et la liberté d’expression.
Alors que les intégristes de
toutes obédiences utilisent la violence contre les laïques, alors que
le droit de blasphème risque d’être remis en cause, la direction
nationale de l’UFAL menace des militants qui diffusent un livre
dénonçant essentiellement l’islamisme.
Cette attitude est inadmissible, par principe et aussi parce que des militants UFAL sont d’accord avec la ligne éditoriale de ce livre [Souligné par moi, MD], j’en ai d’ailleurs vendu 10 à l’AG nationale de cette association.[Quand le commerce va, tout va. MD]
…
Jean-François Chalot président de l’UFAL 77, et Isabelle Voltaire, secrétaire
Donc Isabelle Voltaire craint un certain sectarisme [Note 4] … par rapport aux positions lepénistes de Riposte Laïque car, à part pour ceux qui ne savent pas lire, elles étaient déjà
"lepénistes" avant que Pierre Cassen n’en fasse l’aveu. Ceci est
d’autant plus intéressant qu’elle souligne que ce « sectarisme » est
inadmissible non simplement pour des questions de forme mais - principalement ??? - pour un accord sur le fond « parce que des militants UFAL sont d’accord avec la ligne éditoriale de ce livre ».
N’y aurait-il pas au moins un « angle mort » ?
Cabanac le 11/11/2010
Michel Delord
Note 3 - Sur les débats entre l’UFAL et Riposte laïque, on peut consulter :
Note 4 - Isabelle Voltaire combat les sectarismes
… sauf par rapport à moi puisqu’elle a
été la première membre du GRIP à demander dès 2009 mon exclusion. Virez Delord mais ne soyez pas sectaire par
rapport à Riposte laïque : c’est
un programme complet pour le GRIP.
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TROU NORMAND : IN-NOCENCE ET SAUCISSON-PINARD
La position de Renaud Camus,
directeur-rédacteur-chauffeur-livreur, cette désignation n'ayant pour
moi aucun caractère péjoratif, du parti de l’In-nocence sur l’apéro
saucisson-pinard est fort intéressante. Mais est-il sûr qu’il
s’agit d’une réponse in-nocente au sens où il emploie ce mot, c'est-à-dire une réponse qui ne nuit pas ?
Causeur :
Dans cette perspective, l’affaire de « l’apéro saucisson-pinard » a
clairement soulevé la question des alliances : des « hyper-laïques » de
gauche ont choisi de mener le combat avec des « identitaires ». Peut-on
défendre la France avec n’importe qui? Vous sentez-vous proches des «
identitaires » qui se voient comme une communauté de « descendants de
Gaulois », ce qui, au passage, exclut les « Français-Crémieux » que
nous sommes de la nation?
Renaud Camus
: L’apéro saucisson-pinard n’est pas exactement ma tasse de thé, vous
vous en doutez. Il était organisé par Riposte laïque, auquel je ne vois
pas grand-chose à reprocher. De Gaulle lui-même ne s’est pas montré
trop choosy quand il s’est agi de défendre la France. Cela dit, et si
c’est ce que vous voulez me faire dire, je n’ai aucune espèce de
sympathie pour les néo-nazis, les skinheads, les antisémites et les
nostalgiques de la Collaboration. J’ai toujours été dans l’autre camp.
En revanche, je ne vois pas pourquoi les Français d’origine française
et tous ceux qui se fantasment comme descendants de Gaulois seraient
les seuls, parmi nous, à n’avoir pas le droit de se penser comme un
peuple, comme une culture, comme une tradition, une hérédité, une
histoire. Dans l’appartenance nationale, il faut faire toute sa place
au désir, au désir d’appartenance; mais il n’est pas question d’exclure
pour autant l’héritage, la naissance, l’ascendance; sans quoi l’on
tombe dans le pur hermogénisme, selon le terme que j’ai proposé dans Du sens,
par opposition au cratylisme et en référence au Cratyle : dans la
convention pure, dans l’illusion administrative, dans le règne du coup
de tampon, dans l’in-culture parce que la culture c’est toujours,
aussi, la culture des ancêtres et la présence des morts. Aucun peuple
ne peut subsister sans référence à l’ascendance, et les
contre-colonisateurs le savent bien, qui ne songent pas un instant à
abdiquer la leur, mais voudraient que nous abdiquions la nôtre, en quoi
ils sont d’ailleurs largement entendus. Il ne faut exclure aucun des
deux termes : ni l’appartenance par l’hérédité, ni l’appartenance par
le désir (et dans le cas des « Français-Crémieux », pour reprendre
votre expression, par contribution majeure à la culture
nationale).
Pour ma
part, je n’ai nullement envie de faire dire à Renaud Camus qu’il a des
sympathies pour les néo-nazis, il est beaucoup plus significatif qu’il
se réclame du gaullisme en disant « qu’il n’a[it] pas grand-chose à reprocher à Riposte laïque » et en donnant comme raison : « Le général de Gaulle lui-même ne s’est pas montré trop choosy quand il s’agit de défendre la France ».
Je ne reproche pas à Renaud
Camus d’avoir des sympathies néo-nazies puisque c’est impossible dans
la mystique gaulliste qui oppose le nazisme au gaullisme : or je pense
que Renaud Camus est fondamentalement dans la ligne du général de
Gaulle car c’est quand même le général qui a dit, même si
Gérard Longuet émet des doutes:
«Essayez
d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un
moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les
Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut
absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et
après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les
Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment
les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le
niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait
plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées ! »
Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, t. 1, éditions de Fallois/Fayard, 1994, p. 52.
Cette position donnait à mon
avis une bonne raison de realpolitik, nationale et de défense de la
France – incompréhensible et pour cause pour les colons français et
l’OAS - pour soutenir l’indépendance de l’Algérie.
Cabanac le 11/11/2010
Michel Delord
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